Déshérités au profit des chats et chiens : quand une fortune de 2,6 millions d’euros revient aux animaux de compagnie

Déshérités au profit des chats et chiens : quand une fortune de 2,6 millions d’euros revient aux animaux de compagnie
Héritage animalier, succession animale, testament animal : En France, de plus en plus de propriétaires souhaitent protéger leur animal de compagnie après leur décès.
 
Pourtant, le Code civil ne permet pas de désigner son chien ou son chat comme héritier.
 
Quelles solutions existent pour assurer le bien-être de votre compagnon à quatre pattes ?
 
De la rédaction d’un testament à la désignation d’une association comme la SPA ou la Fondation de France, découvrez comment anticiper et organiser la succession animale dans le respect de la loi.

Le statut juridique de l’animal de compagnie en France

En France, le Code civil (article 515-14) reconnaît l’animal comme un « être vivant doué de sensibilité », mais il reste juridiquement un bien meuble.

Cela signifie qu’un animal ne peut pas être héritier au sens strict du terme. La Cour de cassation rappelle régulièrement que seuls les humains ou les personnes morales peuvent recevoir un héritage.

Selon le professeur Jean-Pierre Marguénaud, spécialiste du droit animalier, « l’animal n’a pas la personnalité juridique pour être successible ».

Ainsi, lors d’une succession, l’animal fait partie des biens transmis, au même titre qu’un meuble ou une voiture, il ne peut donc pas être inclus dans votre testament.

Pourquoi un animal ne peut-il pas hériter ?

La raison est simple : le Code civil réserve la qualité d’héritier aux personnes physiques ou morales. Un animal, même s’il est aimé comme un membre de la famille, n’a pas la capacité juridique. Il ne peut donc pas recevoir directement un héritage ou être désigné comme « successible ».

La jurisprudence de la Cour de cassation est constante sur ce point. En France, la notion d’« héritage animal » désigne donc des solutions alternatives, comme le legs avec charge ou la désignation d’un tiers de confiance.

Que devient l’animal à l’ouverture de la succession ?

À l’ouverture de la succession, l’animal de compagnie est considéré comme un bien transmis aux héritiers.

Si aucun testament n’a été rédigé, ce sont les héritiers légaux qui décident du sort de l’animal.

Ils peuvent accepter de le garder, le confier à une association comme la Fondation 30 Millions d’Amis, ou, dans de rares cas, le refuser.

Si un testament existe, il peut prévoir un legs avec charge à une association ou à une personne de confiance, qui s’engage à prendre soin de l’animal.

Comment protéger son animal par testament ?

Même si un animal ne peut pas être héritier, il existe plusieurs moyens de garantir son bien-être après votre disparition.

La solution la plus courante est le testament avec legs avec charge : vous léguez une somme d’argent ou un bien à une personne ou une association (comme la SPA, la Fondation pour chats Blue Bell, ou la Fondation de France), à condition qu’elle prenne soin de votre animal. Il est aussi possible de désigner un tiers de confiance, voire une clinique vétérinaire, comme l’a fait Madame Liu à Shanghai.

Prévoyez un fonds dédié pour couvrir les frais vétérinaires, l’alimentation et le confort de l’animal. Pour éviter tout abus, il est recommandé de nommer une personne chargée de vérifier que vos volontés sont bien respectées. (Source : Avocat Droit Succession, 2024, quel est le sort des animaux dans une succession ?)

Des héritages animaliers célèbres : Choupette, Trouble, Gunther IV…

Le cas de Madame Liu à Shanghai rappelle d’autres histoires célèbres.

Karl Lagerfeld a indirectement légué une partie de sa fortune à sa chatte Choupette via une fiducie et des personnes de confiance.

Aux États-Unis, Leona Helmsley a laissé 2 millions de dollars à son bichon maltais Trouble, gérés par un trust.

En Allemagne, Gunther IV, le chien de la comtesse Karlotta Liebenstein, serait à la tête d’une fortune colossale. Ces exemples montrent que le phénomène de l’héritage animalier n’est pas limité à la France, même si la législation varie beaucoup d’un pays à l’autre. Aux États-Unis ou en Suisse, la fiducie (trust) permet de garantir la protection de l’animal après la mort du propriétaire, ce qui n’est pas possible en France.

À lire également : 7 façons de gérer le deuil après la perte d’un animal de compagnie

Pourquoi choisir ses animaux plutôt que ses enfants ?

Le choix de privilégier ses animaux de compagnie dans son testament, comme l’a fait Madame Liu, s’inscrit dans une évolution sociétale profonde. Le phénomène « No Kids » prend de l’ampleur : de plus en plus de personnes, en France comme ailleurs, revendiquent leur choix de ne pas avoir d’enfants et élèvent leurs chiens ou chats comme de véritables enfants.

Sur Instagram ou TikTok, on voit des animaux fêtés pour leur anniversaire, habillés, choyés, et bénéficiant de soins dignes d’un membre de la famille. Certains proposent même la création d’une carte vitale pour les animaux ou d’aides publiques pour leur bien-être.

Ce nouveau rapport à l’animal reflète aussi une quête d’épanouissement personnel, d’indépendance et parfois de déception vis-à-vis de la famille traditionnelle.

La baisse de la natalité, l’augmentation des adoptions d’animaux de compagnie et l’émancipation féminine contribuent à ce mouvement. Les priorités changent : l’animal devient un compagnon fidèle, source d’émotions positives et de réconfort, parfois préféré à la famille biologique.

Tendance Description Exemple
No Kids Refus assumé de la parentalité humaine Voyage sans contraintes, liberté financière
Parentalité animale Soins et affection envers l’animal dignes d’un enfant Anniversaires de chiens, éducation canine sur Instagram
Assurances & droits animaux Recherche d’avantages pour le bien-être animal Mutuelles, vétérinaires de famille, projet de carte vitale animale

Démarches pratiques : protéger votre animal en cas de décès

Pour garantir le bien-être de votre animal après votre disparition, voici les étapes à suivre :

  • Rédiger un testament : Précisez vos volontés, en confiant l’animal à une personne de confiance ou à une association comme la SPA ou la Fondation de France. Vous pouvez faire un legs avec charge, en imposant l’obligation de s’occuper de l’animal.
  • Choisir un tiers de confiance : Désignez une personne ou une structure qui veillera au respect de vos volontés. L’École Nationale Vétérinaire de Toulouse peuvent vous conseiller sur la rédaction du testament.
  • Prévoir un fonds dédié : Allouez une somme pour couvrir les frais vétérinaires, l’alimentation et le confort de l’animal.
  • Contrôle et suivi : Prévoyez un contrôle régulier par un tiers pour éviter tout abus ou négligence.

En France, il est conseillé de consulter un avocat spécialisé en droit des successions ou en protection animale pour sécuriser votre démarche. Un testament mal rédigé peut être contesté par les héritiers légaux.

Questions fréquentes sur l’héritage des animaux de compagnie

  • Peut-on faire hériter son animal ? Non, mais on peut organiser sa protection via un legs avec charge ou en désignant une association.
  • Comment choisir la bonne personne ou structure ? Privilégiez une personne de confiance, un proche aimant les animaux, ou une association reconnue comme la SPA.
  • Que faire si aucun héritier ne veut de l’animal ? Prévoyez une solution dans votre testament (association, voisin, ami).
  • Qu’en est-il des animaux exotiques ? Les mêmes règles s’appliquent, mais il est préférable de vérifier les capacités de l’association ou du tiers à s’occuper d’animaux spécifiques.
  • Comment sont gérés les frais et dettes liés à l’animal ? Prévoyez un fonds dédié dans votre testament pour couvrir les dépenses.

Des legs animaliers de plus en plus courants

Les legs animaliers se multiplient en France et à l’étranger. Récemment, un homme à Shanghai a préféré donner près d’un demi-million d’euros à un vendeur de fruits plutôt qu’à ses enfants, et le tribunal a validé ce choix.

Les tribunaux français doivent parfois vérifier que le défunt avait toute sa tête au moment de modifier son testament.

Les héritages animaliers posent de nouvelles questions juridiques et éthiques, notamment sur la gestion des fonds et la surveillance du bien-être animal. Pour en savoir plus sur le cadre légal français, le Barreau de Lyon propose des ressources utiles.

Réactions et débats enflammés

Sur les réseaux sociaux, l’histoire de Madame Liu et d’autres héritages animaliers suscitent des réactions passionnées.

Certains saluent l’attachement envers les animaux et la liberté de disposer de son patrimoine. D’autres dénoncent une dérive individualiste ou une remise en cause de la famille traditionnelle. Beaucoup témoignent de leur propre expérience : animaux préférés à la famille biologique, sentiment d’avoir été mieux entourés par leurs compagnons à quatre pattes que par leurs enfants adultes.

Le débat reste ouvert : où commence l’affection, où finit l’égoïsme ?

Un reflet d’une société qui change vite

Notre rapport à l’héritage, à la famille et aux animaux évolue. Chiens et chats partagent désormais nos canapés… et parfois nos héritages.

Derrière chaque histoire, des questions brûlantes : comment protéger les plus faibles, réinventer la transmission, soutenir l’émergence d’une nouvelle forme de « famille » – parfois plus poilue que prévu. Que ce phénomène amuse, choque ou inspire, il marque un tournant dans notre société et promet encore bien des discussions… et beaucoup d’amour pour tous nos compagnons fidèles.

Anticiper pour protéger son compagnon

En France, anticiper l’avenir de son animal de compagnie, c’est lui garantir une vie heureuse même après votre départ. Rédigez un testament adapté, consultez un juriste ou un notaire, informez vos proches de vos volontés.  

L’héritage animal, la succession animale et la protection animale sont des sujets de société majeurs : planifiez dès aujourd’hui pour protéger votre fidèle compagnon demain.

À propos de l'auteur :

Adel Saadoun
Adel Saadoun

Adel Saadoun, Dr vétérinaire. Passionné d'animaux et de rédaction, j'utilise mes deux passions pour vulgariser l'information médicale animale et faire connaître le monde des animaux de compagnie au grand public: santé, maladies soins quotidiens, entretien, conseils et informations de tous genres.

Adel Saadoun, Dr vétérinaire. Passionné d'animaux et de rédaction, j'utilise mes deux passions pour vulgariser l'information médicale animale et faire connaître le monde des animaux de compagnie au grand public: santé, maladies soins quotidiens, entretien, conseils et informations de tous genres.