
Le 19 juin 2025, le Parlement européen a fait miauler tout un continent : à compter du 1ᵉʳ janvier 2028, la puce électronique sera obligatoire pour chaque chat vivant dans l’Union, quel que soit son mode de vie. Le nouveau règlement – voté à 527 voix contre 71 – impose non seulement l’implantation d’un transpondeur ISO, mais aussi l’enregistrement des données dans une base interconnectée entre États membres. Objectif : freiner le trafic, harmoniser les règles de passage aux frontières et raccourcir le délai de retour lorsqu’un chat se perd à des centaines de kilomètres de chez lui.
Du patchwork national au passeport unique
Jusqu’ici, chaque pays jouait sa partition : puce ou tatouage en France, puce seule mais pas forcément enregistrée en Espagne, identification facultative pour les chats de chasse en Slovénie… Résultat : 48 % des félins européens restaient anonymes, contre seulement 8 % des chiens. Or l’explosion des réseaux de revente illégale – alimentés par des portées non déclarées – reposait précisément sur ce trou réglementaire. « Sans traçabilité, impossible de prouver qu’un chaton vient d’un élevage labellisé », résume la députée néerlandaise Maaike van Roon, rapporteure du texte. Les refuges, eux, croulaient sous les “inconnus” : jusqu’à 180 000 arrivées annuelles sans papiers, dont la moitié ne retrouvaient jamais leur foyer.
Comment fonctionne la puce ?
Sous ce terme se cache un microtranspondeur RFID, long comme un grain de riz (11×2 mm), injecté sous la peau à la base du cou. Il porte un code numérique de quinze chiffres ; les trois premiers désignent le pays (250 pour la France, 276 pour l’Allemagne), les douze suivants l’individu. Lorsque le lecteur émet une onde à 134,2 kHz, la puce renvoie sa séquence en 40 millisecondes, sans batterie ni douleur. Les gencives, les poils, la pluie ? Rien n’arrête le signal, qui traverse deux centimètres de tissu organique. Mieux : la biocompatibilité a été validée sur trente ans d’observation, sans inflammation chronique – contrairement aux tatouages qui s’effacent parfois en cinq ans.
Ce qui change concrètement pour les propriétaires
• Une seule visite vétérinaire suffit : pose de la puce, enregistrement immédiat dans le fichier européen, délivrance d’un QR-code imprimable. Les chats déjà pucés n’auront qu’à vérifier – gratuitement – leur inscription dans la base unique d’ici fin 2027.
Un big data félin, mais pas intrusif
La plateforme, baptisée EUCat-ID, sera hébergée dans trois centres de données redondants situés en Finlande, Allemagne et Portugal. Y figureront : le numéro ISO du chat, son nom, son année de naissance, un contact (téléphone ou e-mail) et, en option, des infos médicales (allergies, maladies chroniques). La Commission assure que l’adresse postale ne sera accessible qu’aux vétérinaires, refuges agréés et forces de l’ordre – un compromis salué par le CEPD, gardien du RGPD. En clair, pas question de repérer votre canapé via le chat : seuls les professionnels verront la localisation précise et uniquement lorsqu’ils scanneront l’animal.
Les bienfaits attendus, chiffres à l’appui
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Trafic : Europol estime que le commerce illégal de chatons génère 150 millions d’euros par an. Avec la puce obligatoire, chaque importation doit présenter un certificat vétérinaire et un numéro valide – un filtre qui pourrait réduire de 70 % les flux clandestins.
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Santé publique : lors des dernières épizooties de rage importée, 72 % des chats interceptés portaient une puce, contre 9 % des positifs. L’uniformisation facilitera le suivi des vaccinations.
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Retours express : en Belgique, l’identification déjà obligatoire fait gagner quatre jours en moyenne pour réunir un chat perdu et sa famille. Extrapolé à l’échelle de l’UE, cela équivaut à 60 000 chats évitant une longue anxiété de refuge chaque année.
Réactions de terrain
« On va enfin arrêter la loterie », se réjouit Sonia, directrice du refuge SPA. « En période de vacances, un tiers des chats trouvés viennent d’Allemagne ou des Pays-Bas ; impossible de joindre le fichier local un dimanche soir. Là, j’aurai la donnée en trois clics. » Les éleveurs saluent aussi la mesure : traçabilité simplifiée pour l’export, lutte contre les pseudo-élevages qui inondent les petites annonces.
Du côté des propriétaires, l’accueil est globalement favorable, même si certains craignent le coût. Bonne nouvelle : la directive impose aux États de plafonner le tarif vétérinaire de pose à 45 € ; plusieurs mutuelles animales prévoient déjà un remboursement intégral. Reste la minorité “anti-puce” pour qui toute intervention médicale est suspecte. « L’obligation fera passer le message que l’identification est un geste de protection, pas une intrusion », .
Un précédent canin qui rassure
La France a déjà rendu la puce obligatoire pour les chiens en 1999 ; les incidents d’importation illégale de chiots y ont chuté de moitié en cinq ans. Le même mécanisme devrait jouer pour les chats, d’autant que la base de données sera directement reliée à I-Cad, Anibase, Tasso et PetPoint via une API commune. Le transfrontalier n’a plus qu’à bien se tenir.
Et demain ?
Les eurodéputés envisagent d’ajouter, d’ici 2030, un module Carnet de santé numérique : vaccination antirabique, stérilisation, dépistage FIV/FeLV. La Fondation 30 Millions d’amis pousse déjà pour que cette dernière mention devienne obligatoire – un moyen de freiner la reproduction sauvage et de soutenir la stérilisation communautaire.
« La puce, c’est la carte Vitale du chat : un clic, et l’animal retrouve son nom, sa maison et son histoire médicale. Sans elle, il n’est qu’un anonyme dans la foule »
Le règlement doit encore passer devant le Conseil pour validation formelle, mais aucun État n’a annoncé s’y opposer. Les vétérinaires conseillent dès à présent de vérifier le numéro ISO de Minette, de s’assurer qu’il correspond aux coordonnées actuelles, et de garder précieusement le QR-code qui deviendra bientôt son laissez-passer européen. Parce qu’un chat peut avoir neuf vies, mais il n’a qu’une seule identité : autant la garder sous la peau. Lire Tout ce qu’il faut savoir sur les micropuces pour chiens